mardi 28 mars 2023

LIVRE, Science, Un

Que fait une science en général à l’égard de son objet, que ferait la bibliologie à l’égard du livre ?... Pas de science sans cette triple postulation : 1. mise entre parenthèses de la philosophie et de la rationalité technologique ; 2. réalité, extériorité et stabilité sous leur forme absolue et non historique ou historiale ; 3. caractère non- « matériel », non- « primaire » ou transcendant, de celles-ci) ? Y-a-t-il une expérience dans laquelle nous accédions à cette réalité non-historique du livre que postulerait une bibliologie contre l’idéalisme technologique ? Elle existe, mais, par définition, elle n’est pas accessible et visible dans l’horizon des présupposés gréco-philosophiques ; elle est insaisissable pour les présupposés dits de l’« Être »... L’essence du livre telle qu’elle est inséparable de la science de celui-ci et de l’expérience que nous en avons, ne s’inscrit pas dans le Monde, dans l’Être ou dans la Machine, et pas davantage dans l’Écriture, elle n’a pas, en général, la forme de l’Autre, mais la forme non-positionnelle (de) soi de l’Un. La perspective technologique fonde un être-au-milieu du livre, mais pas une science non-thétique (du) livre, science qui cesserait de le survoler, de le faire voler et de dissoudre ainsi sa réalité... Le propre des philosophes, c’est, qu’ayant lu un livre, ils ont lu virtuellement tous les livres et accèdent ainsi à l’essence du livre. Le propre du sujet (de) la science ou de l’« homme ordinaire », c’est que lisant un livre, il se contente – en toute finitude – de lire Un livre et ne prétend pas réduire l’essence du livre à la ronde infinie de ses prédicats et à ses prédicats technologiques en particulier.

LARUELLE, 2020, NET