jeudi 9 octobre 2008

CAUSE > Agir

Il existe une pratique absolue ou sans-logos qui substitue l'action à la représentation de l'action, comme il existe une science absolue non-théorétique, purement mystique et contemplative. Cet agir qui reste passif et "minoritaire", sans pouvoir ni autorité, n'a pas pour fonction d'intervenir sur le monde pour le transformer, par exemple techniquement, car il lui faudrait alors s'investir continuement dans la matière et devenir matière. S'il y a une causalité pragmatique ordinaire, elle consiste uniquement à produire ou à révéler l'Autre (la Transcendance ou le Sens) dans sa dimension non-thétique.

L'agir ordinaire reste "en lui-même", il n'est pas marqué par une continuité intentionnelle qui prélèverait ses motifs sur la transcendance du Monde et des Autorités, comme c'est toujours le cas avec la Conscience – ce mixte d'intériorité et d'extériorité, d'immanence et de transcendance – ou même son contraire l'Inconscient comme processus primaire. De façon générale, toutes les explications philosophiques de l'agir reproduisent la structure de la scission unifiante ou de l'unité des contraires et substituent une "raison pratique" à la pratique elle-même.

L'essence du Sujet fini est bien plutôt un Agito qu'un Cogito. Encore faut-il voir dans l'action davantage une pulsion finie qu'une production infinie, une donnée immédiate du mouvement plutôt qu'une transformation finalisée. L'action est pulsion sur le Monde, mais elle ne pose pas "objectivement" le Monde par un continuum idéel allant de l'agissant à l'agi, et en même temps elle ne se pose pas elle-même (auto-position). Bien entendu la pulsion finie n'est pas "soluble" dans une logique inconsciente qui la rabattrait sur une activité transcendante et unitaire, car n'en déplaise à Freud la pulsion ne prend appui sur aucun bord extérieur ("source") et ne poursuit aucune finalité telle que le plaisir ou la satisfaction (étant par elle-même jouissance) ; enfin elle ne connaît pas de "destin" plus ou moins sublimatoire (étant fermée à toute idéalité comme d'ailleurs à toute brutalité).

1985