mardi 13 janvier 2009

REBELLION > Gnose

La non-philosophie est confrontée au retour de la gnose, sous sa forme contemporaine post-marxiste, et à sa question : comment penser la rébellion future ?
Du point de vue de la non-philosophie, la gnose non-religieuse court-circuite une phase nécessaire, celle de son interprétation par la philosophabilité : "avant" même l'illusion religieuse, il s'agit de débusquer l'illusion transcendantale dissimulée dans la philosophie. La religion n'est qu'un cas particulier de la maîtrise, réglée de façon plus complexe et plus globale par la philosophie. User du langage philosophique est donc une nécessité. 
La gnose finit par revenir comme position doctrinale sur le flanc gauche de la non-philosophie, en critiquant celle-ci. Le problème de la rébellion est justement de risquer d'introduire le ressentiment et la réaction dans la lutte contre la maîtrise, alors qu'il faut faire valoir, comme condition même d'une rébellion non-réactive, le (non-)agir de l'Homme-en-personne.

La gnose non-religieuse suppose un Rebelle abstrait, s'ajoutant à la triade constitutive du champ non-philosophique, d'abord parce qu'elle ne pense pas le Réel en immanence mais par transcendance : elle réintroduit dualisme et haine du Monde. 
La gnose pose l'Immanent radical comme altérité au lieu de le poser de manière immanente comme unilatéralité. Elle refuse de voir que le Réel peut "donner" la pensée.
C'est pourquoi en plus de la rigueur qu'impose la découverte non-philosophique du Réel, la gnose non-religieuse se réclame d'un tranchant qu'elle tire de la transcendance platonicienne et du pathos religieux de la division. Par exemple, la gnose désarticule l'identité unilatérale de la théorie et de la pratique, elle en fait une dualité entre théoricisme et pratique.
La contemplation gnostique sous la forme d'un doublet réel-transcendantal se donne des "airs" d'immanence, mais le Rebelle gnostique est un transcendantal métaphysique, dont la genèse est ignorée. La gnose non-religieuse semble une déduction métaphysique plutôt que transcendantale (prenant ses objets dans les mélanges philosophiques de la maîtrise et de la rébellion) de la rébellion. La maîtrise elle-même n'est pas pensée en-Un par le Rebelle (version non-philosophique) mais par l'Ange (philosophe religieux, version théoriste). 
Une simple mention ou allusion "platonique" à la maîtrise ne peut faire émerger le transcendantal. Le clonage explique la genèse du transcendantal à partir du Réel. Or la gnose se donne la religion en court-circuitant son clonage et d'abord son être-donné-en-Réel, du moins tant que la non-philosophie ne se l'est pas appropriée sous la forme d'une théorie unifiée de la philosophie et de la gnose.
Dans la gnose, le Rebelle doublant le Réel ne peut intervenir sur la maîtrise qu'au moyen de l'Ange : argument du 3è homme indéfiniment reconduit, unité transcendante toujours présupposée mais dissimulée dans la suture comme opération même.
En non-philosophie, la Rébellion n'existe qu'en-dernière-utopie, puisque l'Homme et le Rebelle n'ont plus de lieu.
Par l'intermédiaire du Rebelle, l'Homme-Réel met le vide de la possibilité négative au coeur de la maîtrise. L'esprit de lutte fournit au Rebelle la capacité d'utiliser les armes du Maître contre lui ; la maîtrise est non seulement l'occasion mais le matériau de la Rébellion. Bref le Rebelle est transcendantal et non transcendantal et transcendant : dans le théorisme, ce doublet est à l'origine du fameux "tranchant" et de la production des "théorèmes".

2004